Variations sur un thème d’Hisayuki Takeuchi : la soupe cressonière au mungo vert.

28 04 2011

Pour m’imprégner un peu plus de la pensée mystérieuse du Chef Hisayuki, je me suis mise devant mon piano de cuisine en écoutant Mendelssohn et je me suis lancée avec émotion dans l’élaboration de la soupe cressonnière au mungo-vert tirée de « Nouvelle cuisine japonaise » d’Hisayuki Takeuchi ».


Pour 6 personnes :

3 bottes de cresson, 1 oignon blanc, 50gr de soja vert (eda-mame), 1 pomme de terre, 1 gousse d’ail, 1 càs de miso de blé, 1 càs d’huile de noix, 1 litre de dashi de kombu, fleur de sel, poivre blanc.

Nettoyer le cresson, séparer les tiges des feuilles, couper les nervures en deux. Emincer l’oignon, éplucher l’ail, couper le en deux. Ecosser les haricots de soja vert. Dans une casserole  verser l’huile et faîtes revenir doucement l’ail. Lorsque le parfum de l’ail commence à se dégager, ajouter l’oignon, mélanger, cuire sans coloration. Ajouter les feuilles de cresson et le soja vert, faites sauter légèrement. Ajouter les tranches de pomme de terre, lorsque les légumes sont ramollis, verser le dashi de kombu. Ecumer. Ajouter les tiges et les nervures de cresson que vous aurez ficelées en une botte. Cuire 30 minutes. Puis éteindre le feu et laisser refroidir, puis retirer les nervures. Retirer également le kombu. Mixer le tout, saler, poivrer, et réserver au réfrigérateur, une heure minimum, avant de déguster comme un sorbet.

PREMIÈRE  VARIATION

La partition me plaisait, j’ai donc improvisé sur ce thème une variation très colorée

Sorbet de cresson sur soupe de fraises condimentées.

1 barquette de fraises

75gr d’oignons nouveaux

1 càs d’huile de sésame

1càc de vinaigre balsamique de Modène

3càs d’huile d’olive

sel, poivre de la Jamaïque

Mixer tous les ingrédients, remplir une boule de sorbet de cresson dans un joli petit moule, (j’en ai trouvé de ravissants chez IKEA). Les mettre dans le congélateur pendant 1 heure. Dresser le sorbet de cresson au milieu de la soupe de fraises condimentées.

 

DEUXIÈME VARIATION

Sorbet de cresson, fraises, avocat.

Dressage : le sorbet de cresson se dresse au milieu d’une soupe de fraises, agrémentée de boules d’avocats et d’un anchois (facultatif) posés sur des fraises entières. Le mélange des saveurs est surprenant et nous fait voyager entre la France et le Japon. C’est rafraîchissant et délicieux .

 

 



 


 

 

Share on Facebook


POINT D’ORGUE AVEC… LE CHEF HISAYUKI TAKEUCHI

15 04 2011

Le point d’orgue est un signe placé au-dessus d’une note qui indique une prolongation de cette note, c’est une sorte  de pause  qui dure le temps que l’on veut.

Hisayuki Takeuchi est un Chef cuisinier japonais né en 1961 à Seiyo dans l’île de Shikoku. Il devient chef patissier à 24 ans dans un restaurant de cuisine française à Tôkyô. Il ouvre son laboratoire de haute gastronomie avec Elisabeth Paul-Takeuchi son épouse au 7 bis, rue André Lefebvre dans le 15ème arondissement de Paris. Il est considéré comme un des plus grands chefs en France. Réceptif à toutes les émotions artistiques, chaque plat est inspiré par la peinture, la musique et la poésie. Il retrouve ainsi une forme d’harmonie universelle dans l’équilibre des aliments qu’il cuisine comme un artiste pour le bien du corps et de l’esprit.

SB-R Quelle est votre occupation préférée lorsque vous ne cuisinez pas ?

HT J’aime bien lire… Il y a longtemps que je veux relire Thomas Mann;  « Toño Kröger » est un roman que j’ai lu à 20 ans et  je ne l’avais pas compris. Le relire aujourd’hui me permettrait peut-être de le comprendre différemment car je pense avoir évolué depuis mes 20 ans. J’aimerai lire aussi « La Montagne magique » et « Matière et Mémoire » de Bergson. J’aimerais approfondir un peu plus ce sujet, je me pose beaucoup de questions, c’est vraiment mystérieux la mémoire, cela concerne aussi la musique, les couleurs, tout est lié à la mémoire, mais comme je travaille beaucoup, je n’ai pas vraiment le temps d’avancer dans ce domaine !

SB-R Pouvez-vous me citer un plat d’enfance gravé dans votre mémoire ?

HT Le riz chaud. A l’automne le riz venait d’être récolté, ma mère me le préparait, je me souviens de l’odeur et de la couleur de la rizière à l’automne.

( Hisayuki plonge sa mémoire dans le passé en esquissant un sourire presque enfantin ).


SB-R Retrouvez-vous le riz de votre enfance dans votre façon de le cuisiner ?

HT Oui, il a toujours le même goût puisqu’il vient de mon village, je suis très heureux de pouvoir me procurer  ce riz, c’est la qualité qui compte, cela me donne envie de continuer à travailler .

SB-R Est-il en vente dans la « Boutique de la Maison Kaiseki » ?

HT Oui, je l’ai en deux variétés, une pour le sushi, Akita Komachi, et une pour le riz chaud Koshi Hitari.

SB-R A travers quel plat avez-vous découvert la cuisine française ?

HT J’ai commencé à travailler à partir de 20 ans, et pendant 2 ans je ne comprenais pas bien la culture française. Mon chef m’a montré comment il fallait déguster la soupe cressonnière, j’étais saucier, il m’a appris à goûter les yeux fermés 1 …2….3… fois en me concentrant. Après plusieurs essais, et à partir de ce moment là, j’ai sû ce qu’était la cuisine française !

SB-R Aujourd’hui vous vivez dans la capitale française…Si Paris était un plat ?

HT Je pense à un pot- au- feu traditionnel

SB-R Et quelle musique accompagnerait le mieux ce plat ?

HT Edith Piaf… mais cela ne conviendrait pas à ma cuisine !

SB-R Quel est votre compositeur préféré ?

HT En ce moment j’écoute Mendelsohn, Moussorgsky… Il y a plein de joie dans la musique, comme dans la nature qui nous offre des produits naturels, j’aime créer des alliances gustatives et spirituelles. Quand on en a besoin, on écoute, on comprend mieux, on avance; j’ai besoin de Mendelsohn, de Moussorgsky, on entend l’amour, la solitude… si on écoute tout ensemble, c’est dur ! Mais c’est ce dont j’ai besoin en ce moment, je le sens.

SB-R Le son est porteur de sensations, de sentiments, mais si nous revenons à la cuisine, quelle est l’importance d’un son aigü de friture ou bien d’un son feutré d’une cuisson à vapeur ?

HT J’imagine la structure de la molécule, son évolution immédiate, quand elle évolue bien, c’est cuit. Quand elle n’évolue pas, le son est différend. Je peux deviner sans toucher les aliments si la cuisson est bonne. Est-ce que c’est bien cuit ? à point ? saignant ? C’est le son qui me l’indique. J’écoute à point, ou bien saignant, si je ne suis pas sûr je touche, si ça ne suffit pas je mange, mais j’essaie de travailler sans toucher les aliments. Je travaille beaucoup avec la musique, elle vit en moi, elle est installée dans mon coeur pour m’entendre. Il n’y a pas de grande différence entre la musique et moi.

SB-R Pourquoi n’êtes-vous pas musicien ? Vous parlez comme un musicien.

HT Si j’avais eu l’occasion de toucher un piano, un violon qui sont mes instruments préférés, certainement j’aurais pu travailler la musique, mais j’ai eu la chance ou je n’ai pas eu la chance de posséder ces instruments, c’est notre destin, je suis mon chemin.

( Le destin d’Hisayuki est d’être pour notre plus grand plaisir un grand Chef cuisinier créateur ).


SB-R Pour quel personnage mort ou vivant aimeriez-vous cuisiner un plat ?

HT J’aimerais avoir à ma table Spinoza pour discuter avec lui. La conversation serait un plat idéal. Afin que les arômes nous envahissent pleinement, je cuisinerais « cuit ». La fumée s’élèverait embaumées d’odeurs et de promesses vers cet esprit pur qui n’a plus besoin de manger ! Nous sommes handicapés par les désirs de réussite, d’orgueil, d’égocentrisme et lorsque nous, êtres vivants, croquons le « cru » c’est pour réveiller notre conscience. Dans n’importe quelle cuisine saine, on commence par une salade et non pas par une friture : il n’y a pas de hasard !

Sur cette philosophie japonaise très personnelle, je médite devant une tasse de thé vert délicieux en compagnie d’Elisabeth et Hisayuki  Takeuchi, pour réveiller ma conscience un petit sablé bien craquant au thé  Genmaicha sera le bienvenu !


De l’Eau pour le Tohoku

 

 

 

 

Share on Facebook